La pêche et la plaisance

 

La petite pêche côtière et la plaisance

(dossier réalisé en 2013)

La pêche et la plaisance en Méditerranée

Préambule

Le poisson nourrit une bonne part de la planète. C’est un fait. Vivre avec et par les animaux fait partie de notre condition humaine. La raréfaction des ressources marines a émergé avec la pêche industrielle, cela nous le savons. Quant à la petite pêche côtière dans les Alpes-Côte d’Azur celle-ci représente un très faible pourcentage par rapport à l’ensemble des captures effectuées dans nos eaux françaises et elle se caractérise par une activité essentiellement artisanale.

Nos zones de pêche sont restreintes en Méditerranée du fait d’un plateau continental étroit, et c’est bien parce qu’elles ont eu conscience de cette particularité que depuis plusieurs siècles nos Prud’homies ont toujours été attentives aux pratiques de pêche afin de gérer au mieux la pression exercée sur les espèces et permettre ainsi à notre activité de perdurer.

Aujourd’hui notre bassin méditerranéen se trouve confronté à un véritable problème qui chaque saison estivale déstructure toute l’organisation de la pêche artisanale, et cet autre problème pour nos côtes azuréennes qui prend chaque année de plus en plus d’ampleur n’est autre que la navigation de Plaisance. Devant ce phénomène grandissant nos pêcheurs se retrouvent bien souvent dans l’impossibilité de travailler. Devront-ils un jour renoncer à ce qu’ils ont de plus cher ?

Diagnostic et conséquences

La pêche et la plaisance dans le 06En France, la côte d’Azur représente la 1ère destination touristique après Paris. Elle se situe en moyenne à moins de 3h de plus de 30 destinations européennes grâce à l’aéroport de Nice, 2ème aéroport de France, la côte d’Azur est à la portée de plus de 30 pays et elle est la 1ère destination Yachting d’Europe (source : www.nice-tourisme.com). De ces faits, nous pouvons parfaitement comprendre les enjeux que représente la plaisance en Provence-Alpes-Côte d’Azur. En effet, la Région représente environ 32 % des ports français de Plaisance et environ 39 % des places de ports français (source : www.riviera-ports.com), sans oublier bien sûr la manne d’emplois qui
découle de cette activité, renforcée en période estivale du mois de mai jusqu’au mois de septembre. Le nombre de postes est, tous ports confondus, d’environ 14700.

Il est évident que nous ne freinerons pas la croissance de cette activité. Pour exemple, entre 2002 et 2010, sur les seuls ports de Cannes, Golfe Juan et Nice, le nombre de passagers est passé de 281.928 en 2002 à 354.673 en 2011 (source : Site CCI Nice Côte d’Azur Direction des Ports).

Il suffit de regarder la photographie (en titre) prise en pleine période estivale entre les Iles Ste Marguerite et Ste Honorat, ou encore certaines photos prises cet été en rade de Cannes pour comprendre ce à quoi sont confrontés nos pêcheurs durant plusieurs mois de l’année.

Une étude faite en juillet et août 2011 sur la fréquentation des navires de plaisance dans le site Natura 2000 en « baie et cap d’Antibes –Iles de Lérins » démontre clairement des zones de mouillage particulièrement fréquentées. Pour exemple il a été relevé en week-end un pic de 277 bateaux sur la seule zone du croûton dans le secteur du Cap d’Antibes. Sur le secteur des Iles de Lérins on peut noter des pics allant jusqu’à 120 bateaux au mouillage pour des zones relativement réduites comme celle du Cimetière ou de Sainte Anne. Quant à la passe entre les deux Iles il a été comptabilisé jusqu’à 500 bateaux en pleine semaine ! On peut donc aisément imaginer que ce chiffre devait certainement être beaucoup plus important les jours de week-end ! Sachant que ce sont en majorité des unités inférieures à 30 m, il faut comprendre que ces bateaux mouillent de fait dans de petites profondeurs, souvent inférieures à 10 mètres et donc sur les zones de posidonies. Toutefois la grande plaisance n’est pas en reste. En exemple sur les 24 jours de comptage qui ont été effectué cet été 2011 il est à noter une fréquentation pouvant aller jusqu’à 14 unités de plus de 50 m sur la seule zone de mouillage du Piton. Durant ces 24 jours quelques 168 unités de plus de 50 m ont été répertoriées sur les différentes zones de mouillage ! Il a été constaté aussi que certains de ces navires restaient en moyenne plusieurs jours, voire plusieurs semaines sur une même zone.

A cause de cette fréquentation massive de nos eaux par les navires de plaisance, nos pêcheurs doivent faire face la plupart du temps à une mer houleuse, alors qu’il n’y a pas de vent ! Et ont des difficultés certaines dans la pratique de leur travail. En effet, il est fréquent en été que nombre de plaisanciers, aux comportements irrespectueux, passent sur les filets.

Plusieurs rapports de mer ont d’ailleurs été déposés cette année aux Affaires Maritimes pour ce type d’incident. Heureusement, il existe malgré tout des Plaisanciers respectueux et honnêtes qui n’hésitent pas à régler les dégâts (coûteux) qu’ils ont pu occasionner. Sans compter qu’il arrive bien souvent aux pêcheurs de ne pas pouvoir mettre leurs filets sur les zones de cales où ils travaillent habituellement à cause des bateaux de plaisance mouillant dans ces zones.

A cela s’ajoute la problématique des pêcheurs plaisanciers, la Fédération Française compte 1600 licenciés sur le département, quant aux non licenciés ils sont difficilement quantifiables et resteront certainement difficiles à quantifier, mais ils représentent un danger certain pour la pêche professionnelle. Nos pêcheurs savent fort bien qu’ils sont nombreux et très bien organisés sur toute la côte azuréenne. Cette pêche « parallèle » représente un concurrent certain pour la vente.

Mais l’autre conséquence, et à notre avis la plus grave, c’est qu’il ne faut pas oublier que la multiplication des mouillages détruit les zones de posidonie et menace gravement le milieu. Il est inutile de rappeler que la repousse d’une posidonie est extrêmement lente (environ de l’ordre de 1cm en hauteur (épaisseur) de matte par siècle !) et que celle-ci est indispensable à la reproduction des espèces.

Les études de NATURA 2000 ont démontré que certaines zones avaient subi une importante dégradation des posidonies en seulement 4 ans, entre 2007 et 2011.

La pêche et la plaisance sur la Côte d'AzurAujourd’hui, nombre de zones protégées se mettent en place sur toute la côte azuréenne dans le but de préserver le milieu marin. Malheureusement ce n’est pas la pêche artisanale qui déséquilibre aujourd’hui ce milieu, mais bien le nombre croissant de bateaux de plaisance naviguant dans nos eaux. Il est donc impératif que les organisations de sauvegarde et de protection travaillent main dans la main avec les pêcheurs artisans, car les deux tirent vers le même objectif, à savoir, sauvegarder la faune et la flore marine. Il nous paraît indispensable que les plaisanciers soient mieux éduqués et mieux surveillés.

Si nous continuons à laisser cette activité sans véritable garde fou, si certaines mesures ne sont pas prises afin que les règles et les lois soient respectées par ces mêmes plaisanciers et si certaines solutions ne sont pas trouvées pour que l’on protègent nos pêcheurs et qu’ils puissent travailler dans de bonnes conditions, nous allons droit vers un avenir plus qu’incertain de la profession.

Il ne faudrait pas oublier que la plupart des touristes qui viennent profiter de notre belle région aiment aussi déguster dans les restaurants les poissons « de pays », tels que le Loup, La Dorade, la Liche…. et qu’ils sont les premiers à photographier nos pêcheurs rentrant au Port, démaillant leurs filets…. qu’ils apprécient particulièrement d’entendre leur gouaille à « l’accent du Sud » qui fait que cette activité artisanale c’est aussi un peu de l’âme de notre région et son folklore. Veulent-ils vraiment qu’ils disparaissent ? N’auront-ils pas l’impression qu’il manque quelque chose dans le paysage ?

Mais surtout, doit-on se résigner à perdre une activité vieille de plusieurs milliers d’années ? Doit-on obliger des familles entières, dont la plupart sont pêcheurs depuis plusieurs générations, amoureux de leur métier, à se résigner et à changer non seulement de profession, mais aussi de style de vie rempli de traditions et d’histoires ?

Alors oui les pêcheurs veulent pouvoir travailler et dans des conditions acceptables. Ils ont d’ailleurs exprimé leur mécontentement par un article de presse paru dans le quotidien Nice Matin le 13 septembre 2011.

Solutions…

La pêche et la navigation de plaisanceIl en existe, nous en avons. Certaines pourront sembler difficiles à mettre en place et à appliquer mais nous pensons sincèrement que si certaines mesures ne sont pas prises rapidement et si celles-ci ne sont pas respectées nous risquons de voir le poisson se raréfier chaque année un peu plus, de voir certaines espèces migrer ou disparaître et ce dans un laps de temps relativement court.

1/ Il nous semble important que soit installé des zones de mouillages sur des sites bien précis pour les plus grosses unités (à partir de 50 m) et que ces navires respectent ces zones de mouillage, sous peine d’amende.

2/ L’interdiction pour les navires de 10 à 35 mètres de mouiller à l’intérieur des 25 m de fond (dans le cadre de la préservation des zones de posidonies) et pour les navires de plus de 35 m l’interdiction de mouiller à l’intérieur des 35 m de fond, ce sur toute la côte azuréenne, sous peine d’amende.

3/ Voir à interdire de mouiller sur certaines zones de cales afin que nos pêcheurs puissent continuer à travailler et ce tout au long de l’année. Projet dont nous souhaiterions discuter lors des prochaines réunions du Comité de Pilotage dans lequel nous souhaitons être intégrées.

Particularité pour les bateaux de moins de 20 mètres pour la Zone d’Antibes – Juan les Pins :

Nous souhaiterions privilégier 3 ZONES DE MOUILLAGE FIXES pour les bateaux de moins de 20 mètres, à savoir :

Les abords du Port de la Salis, l’abri de l’Olivette « Port du Crouton » ainsi que l’anse de la Garoupe subissent en période estivale de nombreux mouillages des navires de plaisance. Il semblerait que ces 3 sites bénéficient de zones d’herbier encore préservées mais nos pêcheurs ont constaté que ces sites présentés également à certains endroits des zones de sable qui sont soit naturelles, soit provoquées par les mouillages successifs. Aussi, il serait judicieux de privilégier ces dernières pour installer des mouillages fixes afin de préserver les zones où l’herbier de posidonie est encore présent.

Pour la Zone de Cannes :

– Zone interdite aux mouillages et à la pêche de Plaisance, de la Porte de l’Aiguille jusqu’à la porte de la Galère et ce de 0 à 40 m de fond.
– Maintenir les zones de cales protégées, à savoir : pointe de l’Esquillon, Porte des 2 frères, la Petite Vaquette et devant la Port de la Rague.

Nota : Les autres Prud’homies, à savoir celles de Cagnes sur Mer, Nice, Villefranche et Menton, ne nous ayant pas fourni d’informations sur leurs intentions à ce sujet, nous ne pouvons pas vous transmettre de directives les concernant.

Propositions d’ancrage 

Nous privilégions les ancrages à vis et dans l’absolu les corps morts en demi-lune avec attache en creux pour ne pas nuire aux filets de pêche.